La famine en Ukraine dans les livres d'Histoire
Historiographie de la famine en Ukraine, après la Sconde Guerre mondiale
1. Le cas du "que-sais-je ?", Histoire de l'URSS 2.1 .Pléïade, Histoire Universelle, 1958 2.2 Braudel, "Grammaire des civilisations", 1958 |
J'ai parcouru un certain nombre d'ouvrages scolaires ainsi que des ouvrages à vocation plus ou moins encyclopédique publiés entre 1945 et 1980 pour y rechercher quelle place y était faite à la famine de 1933. Sachant que la place de la Shoah dans l'histoire de la seconde guerre mondiale avait évolué considérablement au cours des temps, j'ai parfois mentionné le traitement fait à la Shoah, à titre de comparaison. Parfois aussi, je me suis intéresé au traitement réservé au Goulag.
Depuis 1945 jusqu'au courant des années 1970, la collection "Que-sais-je" des PUF (Presses Universitaires de France), référence dans le monde scolaire et universitaire, encyclopédie vendue par petits volumes de moins de 125 pages, et donc accessibles au plus grand nombre, choisit Jean Bruhat pour rédiger le volume "Histoire de l'URSS". De beaux diplômes, celui de la rue d'Ulm et une agrégation d'histoire, et le fait d'être militant communiste suffisent à le désigner comme spécialiste de l'URSS. On confie de la même façon à des jésuites les titres touchant de près ou de loin au catholicisme. On peut voir dans cette façon convevoir l'édition la mise en place d'un Yalta culturel ou tout simplement la mise en œuvre d'un marketing efficace qui définit des produits adaptés à leurs lectorats.
Né le 24 août 1905 à Pont-Saint-Esprit (Gard). Mort le 11 février 1983 à l'hôpital Lariboisière. Marié à Yvonne Maugis - trois enfants. Normalien (rue d'Ulm), professeur agrégé d'histoire, docteur ès Lettres. Militant communiste.
Adhère
au parti en 1925,en rentrant à l'ENS. Après son service militaire, nommé prof
à Nantes, il assume des responsabilités à la Fédération régionale du PC et
au syndicat unitaire local. Puis assume des responsabilités nationales dans le
syndicalisme enseignant. A partir de 1937, collabore aux Cahiers du Bolchevisme
et à l'Humanité.
D'après
J.Maitron, "Si lors de ses vingt ans il avait eu des doutes quant à " la
question russe ", Bruhat était désormais rallié au stalinisme -- le
mot n'apparaîtra que plus tard" . Nommé au lycée Buffon en 1937.
Historien, il est surtout " utilisé " à ce titre par le
Parti. Dans ses articles de l'Humanité, il justifie les procès de Moscou Lié
d'une profonde amitié avec Politzer, Solomon, il fait partie de ce petit groupe
d'intellectuels qui, sans assumer de responsabilités dans l'appareil, collabore
assez étroitement avec la direction du Parti. "
Toujours
d'après Maitron, en 1939, il est "bouleversé non pas tellement par le
traité germano-soviétique mais par le comportement de la direction du PCF à
ce propos." Prisonnier de guerre libéré en mars 43, contacté par le
Parti et toujours en désaccord sur certains problèmes, il se refuse à un
engagement permanent. À la Libération, lycée
Michelet puis professeur de khagne au lycée Lakanal, et maître-assistant à la
Sorbonne puis à l'Université de Paris VIII. Reste à la disposition du Parti,
il organise la Commission d'éducation ouvrière de la CGT et poursuit sa
collaboration à l'Humanité.
A
propos des événements de Hongrie, il écrit à son ami Zyromski, le 24 juin
1958 : " J'étais assez désemparé et je le suis encore plus. Il
y a des exclusions [...] J'étais de ceux que le XXe congrès avait enthousiasmés,
des perspectives semblaient s'ouvrir sur la voie du socialisme français ",
il déplore l'exécution de Nagy non justifiée " par les nécessités
actuelles de la lutte des classes ".
Ce
n'est qu'en 1980 qu'il prend officiellement ses distances avec l'URSS et la
direction du PCF.il condamne (cf. Le Monde 8 janvier 1980) l'intervention
soviétique en Afghanistan estimant " regrettable " que le
Bureau politique du PCF n'ait pas souligné suffisamment cette violation des
principes de souveraineté et d'indépendance. Il est aussi l'un des 29
intellectuels qui créent, en janvier 1980, un Comité pour la défense des
Libertés et des Droits de l'Homme en Tchécoslovaquie (Le Monde, 11 janvier
1980)..
OEUVRE :
Nombreuses études et publications sur le mouvement ouvrier. Le dernier ouvrage
de J. Bruhat : Il n'est jamais trop tard, janvier 1983, Paris, Albin
Michel, 292 p., apporte, sur la vie et l'oeuvre de l'auteur, une ample
documentation.
Les éditions de 1945 à 1970 et même après sont signées de Jean Bruhat, normalien ouvertement communiste (Il collabore à l'Humanité depuis 1937). La famine de 1921 est clairement évoquée.
Le chapitre 7, "L'évolution de l'URSS de 1927 à 1939" commence par une biographie, puis un panégyrique de Staline:
" Il (Staline) jouit en URSS d'une extrême popularité qu'il semble devoir non seulement aux sccés de sa politique, mais aussi à certains traits de caractère. Intransigeant sur les principes, il sera d'une extrême souplesse dans l'application. D'une très grande simplicité de vie (qui est d'ailleurs dans la tradition bolchevique), d'une bonhomie souriante, il use dans ses rapports et discours d'une éloquence rude, dépoillée, logique, faite de raison plus que de passion, enrichie de références constantes à l'expérience populaire, comme aux meilleurs classiques de la littérature russe. L'humour n'est pas non plus pour lui déplaire, ni parfois le trait dur qui porte. et surtout, plus qu'aucun autre, il a le sens réaliste de ce qui est opportun à un moment donné, n'hésitant pas , le cas échéant, à conseiller après une sévère "autocritique" le retour en arrière qui permet de repartir de l'avant dans de meilleures conditions…" |
4 pages sont consacrées à l'agriculture dans le 1er plan quinquenal.(1927-33)
" On pouvait en effet, pour augmenter la production favoriser les koulaks, mais on allait à l'encontre des principes du régime. On pouvait aussi, "puisqu'il était impossible de sortir de la misère par la petite exploitation" passer à la collectivisation des entreprises agricoles; c'était alors, de toute évidence, se heurter aux koulaks, qui ne pouvaient accepter la collectivisation…. C'est donc dans ce sens que va s'orienter le gouvernement. Mais il importait sans aucun retard de "liquider" les koulaks… La bataille fut rude, - on a pu parler d'un "Octobre" des paysans, - lle se termina par la liquidation des koulaks. Cette lutte va de pair avec les débuts de la colectivisation… C'est entre les koulaks et les premiers kolkhoziens que le conflit atteint sa plus grande violence… pour obtenir des succés à tout prix, des administrateurs locaux précipitent la collectivisation… Ces procédés, exploités par les koulaks, provoquent un malaise, puis des incidents. On assiste à de véritable hécatombes de bétail… Dans un article célèbre, Staline proteste contre de telles pratiques (2 mars 1930). Ilrappelle qu'il ne faut en aucun cas renoncer au principe du libre consentement… " |
Bruhat s'étend ensuite sur l'essor du mouvement kolkhozien, avec force statistiques et en vient ensuite au bilan du 1er plan
"Dans l'agriculture, les progrès avaient été plus lents du fait de la vicissitude de la collectivisation. Des résultats cependant avaient été obtenus: Blé : 717 milions de quintaux… Ajoutons que les conditions de vie des ouvriers et des paysans avaient été améliorés…" |
Dans la partie consacrée au 2eme plan quinquenal, peu de choses sur l'agriculture, si ce n'est quelques lignes sur la prospérité des kolkhozes.
On en arrive donc à la période de l'épuration:
" Le pays a retrouvé, sauf aux débuts de la collectivisation, le calme nécessaire à l'élaboration des grands travaux. Le pouvoir des Soviets est maintenant consolidé. Il jouit de l'appui et de la confiance des populations. Il n'y a plus d'opposition ouverte à la direction du parti bolchevik. On note même une détente certaine dans le mécanisme de la "dictature du prolétariat". Des miliers de déportés, en particulier ceux qui avaient pris part à la construction du canal de la mer Blanche sont amnistiés et peuvent devenir kolkhoziens…. Cependant, si l'opposition ouverte est devenue impossible, les complots et les sabotages sont assez nombreux pour que soient prises contre leurs auteurs les mesures les plus sévères. Le point de départ fut l'assassinat à Léningrad de S.M. Kirov…" |
Après quelques développements et l'énumération de queques exécutés célèbres (Toukatchevski…)
" Dans le même temps, il fut procédé à une épuration massive du parti. Le procédé n'était pas nouveau. Il avait déjà été utilisé sous la NEP pour protéger l'organisation d'une infiltration des éléments capitalistes que la NEP tolérait. C'est ce qu'on appelait un nettoyage (Tchitska). Lorsque Kirov fut assassiné, une épuration était en cours. Elle fut poursuivie avec une vigilance accrue.Certains abus s'étant produits, le XVIIIeme Congrès du parti (1939) décida la suppression des épurations massives et le respect strict de la démocratie à l'intérieur du Parti. " |
Le texte de l'édition de 1961 est absolument inchangé, à l'exception de petits ajouts:
Le panérygique de Staline se trouve enrichi d'une note de bas de page:
" Le jugement porté aujourd'hui sur Staline en URSS retient ces aspects positifs et met en lumière les mérites de Staline comme marxiste et comme révolutionnaire. Mais il souligne les traits négatifs de son caractère, la non-observation (par lui) du juste équilibre entre la centralisation du pouvoir - de toute façon indispensable sous le régime de la dictature du prolétariat - et la démocratie plus large qui découle de la nature même du régime socialiste, la violation des règles léninistes de la vie du Parti et de la légalité soviétique (D'après la revue Kommounist, avril 1956). L'encyclopédie soviétique (tome 40) reprend pour l'essentiel cette argumentation…" |
En plus de cette note de bas de page, il y a évidemment quelques éléments nouveaux sur l'histoire récente de l'URSS, en particulier le Xxeme Congrés, qualifié d'événement le plus important de l'histoire de l'URSS depuis la guerre "…Les aspects négatifs ont été aussi fortement mis en lumière, à savoir , pour l'essentiel, la surestimation du rôle de Staline ("le culte de la personnalité"), des violations graves de la légalité socialiste et une hypertrophie de la bureaucratie…"
Dans l'édition de 1970, la note de bas de page a été remontée dans le texte, avec un petit ajout :"L'historien qui se refuse aux jugements de valeur constate que certaines options décidées sur les indications de Staline ont été déterminantes (possibilité de réaliser le socialisme dans un seul pays, primat de l'industrie lourde; collectivisation)"
Le passage sur la collectivisation de l'agriculture reste celle de 1945. Toujours aucune trace d'une famine en Ukraine en 1933. Par contre, le paragraphe sur l'épuration et les procés est sensiblement amendé:
"Il est impossible, encore à l'historien, de faire toute la clarté sur le début, les causes et l'expansion de cette répression…" |
Les victimes des procés ne sont pas forcémment des saboteurs, mais aussi "des hommes qui n'avaient été mêlés à aucun groupe d'opposition mais qui n'acceptaient ni l'autoritarisme de Staline, ni la violation de la légalité socialiste."
Et une appréciation négative sur ces purges:
"ces purges auront pour résultat d'affaiblir à la veille de la guerre les cadres administratifs, politiques et militaires du régime. Elles semblent toutefois avoir laissé assez indifférente la masse de la population qui ne se sent guère concernée par une répression qui atteint surtout (mais pas exclusivement) les sommets de la société soviétique" |
- "La crise de l'Europe", par Jean Vidalenc, qui recouvre l'époque de 1914 à 1945, 5 pages sur la SGM, zero ligne sur l'extermination des juifs.
- "Le Monde Slave", par Alfred Fichelle, 11 pages sur l'histoire de l'URSS, dont 2 pages sur la politique intérieure de l'URSS
"La collectivisation agricole s'opéra au début dans le plus grand désordre à cause de la mauvaise volonté des paysans aisés ou koulak. Une répression cruelle s'ensuivit." |
Dans
la Grammaire, Hitler est pratiquement ignoré, mis à part 2 lignes en référence
à Napoléon "Même schéma pour l'Allemagne Hitlérienne qui a réuni
contre elle une coalition à la mesure de la menace: En fait, la plus grande
partie du monde."
Par contre, 27 pages sur "L'URSS de 1917 à nos jours". Beaucoup de développements
sur Marx et Lénine, comparaison avec la période du comité de salut public de
la Révolution française, beaucoup également sur les taux de croissance économique
depuis la fin de la guerre, comparaison entre différents pays européens et
l'URSS, développements sur la musique, la culture... La période de Staline est
zappée, elle n'est qu'évoquée, par exemple en ces termes:
"Les tentatives soviétiques pour réorganiser la production agricole de façon
collective, et qui tournent à l'échec, semblent se heurter aux résistances de
la paysannerie que le stalinisme a malmenée..." |
Finalement, dans tous les textes de cette époque, on ressent la même volonté
d'oublier ce qui n'avait jamais été explicité. On ne s'appesantit pas sur la
spécificité meurtrière d'une époque ou d'un régime. Ce n'est pas qu'on
l'enjolive, on suppose que ces choses-là sont connues, et on les théorise.
-
10 pages sur "La montée des périls et le 2eme guerre mondiale". zero
ligne sur l'extermination des juifs. (il y a ailleurs de longs développements
sur l'affaire Dreyfus)
- La révolution russe n'est traitée qu'indirectement et l'histoire de l'URSS
n'intervient que dans le cadre de la SGM ou de la bipolarisation d'après-guerre.
12 colonnes accordées à l'histoire de l'URSS, aucune mention de la famine de 1932-33. Tout juste est-il fait allusion à la "liquidation" des koulaks en 1929 et à quelques problèmes dans l'agriculture, une baisse du rendement qui conduit à autoriser les kolkhoziens à posséder une vache et un petit jardin. Rien non plus dans les articles "Staline" et "Ukraine".
La "terrible famine de 1921" est citée comme l'un des facteurs qui a incité Lénine à mettre en œuvre la "NEP".
Aucune
mention n'est faite du Goulag.
Ci-dessous
le texte du Duroselle (la feuille portant la date de l'édition a disparu, mais
il me semble que c'est 1961. Précision : le Duroselle couvre la période
1914-1945).
Dans ce manuel de terminale, le chapitre 8 est consacré à "La Russie soviétique
de 1917 à 1939", réparti en trois parties. La troisième est intitulée
"Staline et l'ère des plans quiquennaux (1928-1939).
2. Les plans quinquennaux
a) Le premier plan (1928-1932)
En deux parties. La première traite de l'industrie, la seconde de
l'agriculture
" Dans l'agriculture, le premier plan consista surtout à « liquider » les koulaks et à collectiviser leurs terres. Aux sovkhozes, entreprises d'État, cultivées par des salariés et qui servaient de modèle, vinrent s'ajouter les kolkhozes, vastes fermes coopératives dont le sol appartenait à l'État et dont les produits étaient partagés entre l'État et les paysans proportionnellement à leur travail. Cette réforme suscita des crises, les paysans s'opposant à la collectivisation qui s'étendait à tout, habitations, bétail, volailles. Beaucoup tuèrent leurs bêtes avant d'entrer dans les kolkhozes. Il fallut revenir en arrière et autoriser les paysans à garder en privé leurs maisons, jardins, volaille et un peu de bétail. La collectivisation fut rapide. En 1928, 1 390 000 ha étaient cultivés par les kolkhozes. En 1933, 75 millions. " |
C'est tout. Rien sur le Goulag dans tout le chapitre consacré à l'URSS. Une
demi-page sur l'épuration, mais n'évoquant que la déportation de
"milliers de bolchéviks en Sibérie", en faisant apparaître un
certain durcissement de leurs conditions de vie.
Par comparaison, le même manuel
sur la Seconde Guerre mondiale
|
terminale 1964/ 65 : la couverture a disparu mais je suis sûre qu'il était fait par JB Duroselle (peut être chez Nathan):
chapitre "Les plans quinquennaux", p.132 26 lignes sont consacrées au premier plan (1928-32) "Dans l'agriculture, le premier plan consista surtout à "liquider" les koulaks et à collectiviser leurs terres. Aux sovkhozes, entreprises d'état, cultivées par des salariés et qui servaient de modèle, vinrent s'ajouter les kolkhozes, vastes fermes coopératives dont le sol appartenait à l'Etat et dont les produits étaient partagés entre l'Etat et les paysans proportionellement à leur travail. Cette réforme suscita des crises, les paysans s'opposant à la collectivisation qui s'étendait à tout, habitations, bétail, volailles. Beaucoup tuèrent leurs bêtes avant d'entrer dans les kolkhozes. Il fallut revenir en arrière et autorises les paysans à garder en privé leurs maisons, jardins, volailles et un peu de bétail. La collectivisation fut rapide. En 1928, 1 390 000 ha étaient cultivés par des kolkhozes. En 1933, 75 millions." |
dans la leçon "construction du socialisme" (1928-1941) " Conduite avec brutalité, la collectivisation se heurte à la résistance passive ou violente de la paysannerie. Elle entraîne une grande famine pendant les années 1933 à 1935 et coûte la vie à plusieurs millions d'hommes." |
+ en document : des extraits de Terres défrichées, Cholokhov ( il est dit que
ce témoignage a été publié en 1932) et un graphique du cheptel bovin de 1913
à 1939.
L'Ukraine n'est pas citée particulièrement
Page précédente ( 1917-1928), il y a une photographie de morts sous titrée
"La Russie épuisée" octobre 1921. En commentaire: la guerre civile
et la mauvaise récolte réduisent le peuple russe à la misère. L'hiver
1920-21 est difficile; en été une sécheresse exceptionnelle ruine la récolte
dans les plaines de la Volga. La famine fait plus de 5 millions de morts.
Par comparaison, le même manuel sur la Seconde Guerre mondiale
Dans
tous les pays conquis, l'économie est entièrement mise au service des
Allemands. Le pillage des ressources est systématiquement organisé : matières
premières, produits alimentaires, payés à bas prix, sont expédiés vers
l'Allemagne. Les biens des juifs, partout expropriés, tombent aux mains des nazis ou de leurs collaborateurs. Les pays vaincus doivent payer de lourdes indemnités pour l'entretien des troupes d'occupation. Pour participer à la « croisade contre le bolchevisme », des volontaires sont recrutés dans toute l'Europe; les gouvernements satellites de l'Allemagne, roumain, hongrois, finlandais, doivent fournir des contingents. L'industrie de guerre allemande a besoin de main-d'œuvre. Elle fait appel aux volontaires; mais, bientôt, le « service du travail » devient obligatoire. Beaucoup de jeunes gens réfractaires au S.T.O. vont grossir les rangs des maquisards. Dans l'Europe de l'Est, des millions d'hommes sont purement et simplement déportés vers les camps de travail où ils deviennent les esclaves des industriels allemands. Dans les camps de concentration se retrouvent condamnés de droit commun, résistants, otages, populations vouées à l'extermination telles que les tziganes et les juifs. Les nazis ont en effet décidé et mis en ocuvre l'extermination de tous les juifs d'Europe. Regroupés dans des ghettos où ils sont décimés par la faim et les épidémies, les juifs sont ensuite entassés dans des wagons de marchandises et envoyés vers les camps de concentration où ils sont exécutés. Le nazisme est responsable de la mort d'environ dix millions de juifs européens. Si les Allemands trouvent dans tous les pays des collaborateurs par conviction politique, par peur ou par intérêt, ils rencontrent aussi des résistances de plus en plus organisées. Dans toute l'Europe, et en particulier dans les Balkans, les partisans mènent une guérilla efficace qui contraint les Allemands à d'importants efforts militaires. En Yougoslavie, ils conduisent une véritable guerre de libération nationale qui les rendra, en 1944, maîtres du pays. +une photographie d'un déporté +un extrait de Hosz ( Nuremberg) sur l'extermination à Auschwitz |
La collectivisation agricole, p.312 "Le premier plan bouleverse les structures foncières et se substitue à l'agriculture et la propriété individuelles une agriculture collective. En 1929 94% des paysans exploitent individuellement leurs terres. Staline propose alors de développer la colectivisation soit dans des fermes d'Etat, les sovkozes où les paysans sont des salariés, soit dans des coopératives, les kolkhozes. Il lance le mot d'ordre "la liquidation des koulaks en tant que classe". La rupture est brutale: En mars 1930, 58% des terres sont regroupées dans les kolkhozes, et en 1934, 88%. Les paysans sont contraints d'entrer dans les coopératives: Leurs terres, mais aussi leurs maisons, voire le bétail et l'outillage, sont souvent collectivisés. Les autorités locales doivent confisquer les biens des koulaks et les expulser. Menée par des comités de paysans pauvres et d'ouvriers venus des villes, cette collectivisation brutale suscite la 'résistance des paysans qui abattent leur bétail, refusent de travailler.. La "dékoulakisation" dépasse les limites assignées et touche, outre les 3 millions de koulaks, une partie des paysans moyens. Le bilan est lourd: dépossédés de tout moyen d'existence, souvent réduits au vagabondage ou déportés dans des camps de travail, 3 millions de paysans périssent. La situation est si tendue que Staline fait des concessions. A partir de mai 1932, les paysans sont autorisés à sortir du kolkhoze, la saisie du bétail et des objets personnels est interdite. Les kolkhozes peuvent commercialiser librement leurs excédents après avoir payé ses impots et constitué ses stocks réglementiares. La rémunération de chacun selon le travail accompli satisfaitles paysans. En 1933,le kolkhozien reçoit en jouissance un lopin de terre de moins d'un hectare, ainsi que le droit de posséder quelques vaches et une basse-cour; il peut vendre sa production sur le marché libre…" |
Ensuite, le manuel enchaine sur les grandes purges (De 1933 à 1938, le pays est frappé par une épuration sans précédent alors que la situation se détend…)
Nathan
1° dirigé par J.Marseille 1988
La
collectivisation dans les campagnes 1932-33, p.275 "
La croissance de la productivité agricole apparaît comme une condition indispensable pour réaliser uns
industrialisation rapide. L'agriculture doit
fournir le ravitaillement quotidien d'une population en
augmemtation, et de le faire avec de moins en moins de paysans, l'industrie
ayant des beoins de main-d'œuvre. Elle
dort de plus fournir un surplus exportable pour financer l'importation de
machines. Pour ce faire, Staline et le parti estiment nécessaire de briser
l'agriculture familiale, archaïque
et routinière et d'imposer les formes collectives que sont le sovkhoze et le
kolkhoze. Ceux-ci doivent à la fois permettre une modernisation plus rapide et
faciliter les livraisons de produits agncoles à l'Etat. Tâche d'autant plus
difficile que le Parti communiste est mal implanté dans les campagnes, et qu'il
trouve en face de lui, et contre lui, malgré l'existence de différenciations
sociales entre koulaks (environ 5% de la paysannerie) et paysans pauvres, une
forte solidarité vilageoise. Les moyens choisis sont d'abord une très forte pression exercée par l'intermédiaire des réquisitions. Elle est parfois si forte que les paysans ruinés n'ont d'autre solution pour survivre que d'intégrer les kolkhozes. Ensuite, c'est la création des MTS (Stations de Machines et de Tracteurs) qui centralisent les machines agricoles attribuées aux kolkhzes. Tenues par des ouvriers et des militants du parti, elles sont conçues comme un moyen d'encadrement de la paysannerie. Mais les résultats ne semblent pas assez rapides. Aussi, en 1930, le parti déclare nécessaire de "liquider les koulaks en tant que classe". Le terme de koulak finit par désigner tout opposant à la collectivisation. C'est le début d'une véritable guerre contre les paysans: arrestations, déportations, exécutions, touchent près de dix millions de personnes. Les paysans répondent par des jacqueries et un vagabondage de masse, mais aussi par une réduction de la production. En particulier, ils abattent leur bétail avant d'entrer dans les kolkhozes. Si l'on fait en 1933 un bilan du premier
plan quinquennal, il est violemment contrasté. Certes, la collectivisation est
pratiquement faite. En quatre ans, le vieux monde rural russe a été brisé.
Les effets sur la production ne sont pas ceux attendus. Le niveau de production
régresse. Pendant l'hiver 1932-33, le pays connaît dans les campagnes une
terrible famine qui rappelle celles du communisme de guerre et fait plus d'un
million de morts dans les campagnes. |
La question des manuels scolaires a également été abordée par Jacques Chevtchenko. J'ai recopié des extraits brut de brut
http://www.ukraine-europe.info/ua/dossiers.asp?1281011516
La
plupart des manuels parlent d'" une grande famine de 1933 à 1935"
de " la famine de 1933 ", de " la famine", d'
" une famine ", " (…) des famines " , d'
" une grave famine ", de " la famine (qui) réapparaît
" On parle d'" affamés " et on finit par écrire le mot
" famines ", au pluriel mais dans une liste des victimes du
" système concentrationnaire soviétique ", mais La famine
n'existe pas dans huit des manuels étudiés, français, belges et suisses.
Un seul manuel écrit : "En 1932-1933, la famine touche l'Ukraine
et le Sud de la Russie, provoquant la mort d'environ 6 millions de
personnes." (Le texte souligné en gras l'a été par l'éditeur ou
l'auteur) c'est le Magnard de 3e publié en 2003.
Sur l'échantillon représentatif, on arrive au graphique suivant :
36% des manuels ne mentionnent aucune famine dans les pages consacrées à la
collectivisation 59% parlent de famine(s) sans explication 5% de famine en
Ukraine.
Le
nombre des morts varie, ce qui est normal, de " plusieurs millions
d'hommes" , "6 à 8 millions de morts" (ici en comptant les
victimes de la répression politique), "d'au moins trois millions",
"neuf millions de victimes" (de toutes les répressions de cette période),
"entre 10 et 15 millions de morts" (pour l'ensemble de la période
stalinienne), " environ 6 millions de personnes " pour le
manuel qui parle de la famine en Ukraine et dans le Sud de la Russie.
Ce qui est moins normal, c'est l'amalgame opéré le plus souvent de toutes les
victimes en un seul et grossier compte macabre de toute la période stalinienne.
Ce procédé permet de minimiser l'ampleur du phénomène " famine "
surtout lorsque le terme " paysans " n'est pas employé pour parler
des victimes de la collectivisation.
Omniprésence de la famine de
1921 en Russie
Aussi étonnant, la famine de 1921, elle, est très largement évoquée dans les
manuels de 3e et illustrée dans les ouvrages du secondaire, contrairement à
celle de 1932-1933.
Omniprésente, la famine de 1921 est toujours qualifiée de "grande",
"terrible" ou "effroyable"
On sait aujourd'hui avec les travaux de l'historien canadien Roman Serbyn
qu'elle fut aussi ukrainienne et un ballon d'essai.
Un vocabulaire loin d'être innocent
L'étude du vocabulaire utilisé conjointement avec le mot " famine"
montre que l'usage de verbes comme " apparaît ", "réapparaît
" tend à minimiser l'impact ou les origines d'un phénomène que l'on
" sait " être récurrent, donc normal, dans l'ancien Empire tsariste.
Jamais, elle n'est dite " provoquée " par Staline. Lorsqu'il est dit
que la dékoulakisation " touche " 3 millions de paysans, que
mettre sous le mot ? Ont-ils été dépossédés, expulsés, déportés, tués
ou morts de faim ?
Le déni en guise de conclusion…
En guise de conclusion, nous avons gardé, si on peut dire, le meilleur pour la
fin, c'est-à-dire l'utilisation d'une certaine terminologie pour caractériser
la collectivisation et la famine ou encore la nier comme génocide. On a déjà
vu les approximations des auteurs, mais quand on lit que " la dékoulakisation
dépasse les limites assignées " et que " la collectivisation
est conduite très violemment par les rouages inférieurs du Parti, plus durs
envers les paysans que ne le souhaitait Staline ", on peut légitimement
s'interroger sur le niveau de culture ou l'honnêteté intellectuelle des rédacteurs
de tels manuels. Elle pose aussi le problème du sérieux du travail des .
De nombreux rédacteurs caractérisent la collectivisation et semblent en
excuser, ou à défaut à admettre, ses conséquences en expliquant que l'on
avait faire à une " guerre civile ", une " guerre
civile contre les koulaks ", une " une véritable guerre menée
contre les paysans " et même " la guerre de l'Etat contre la
paysannerie ".