HISTOIRE DE LA CSF SOUS L'OCCUPATION, « l'enfance de Thales » La production des usines SFR de Lyon et d'Alger pour les armées françaises (Création 11 novembre 2012)
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L'essentiel des livraisons effectuées par la SFR à ce qui restait de l'armée de terre, de la marine ou de l'aviation française se situait en marge de la convention d'armistice, aux termes assez vagues, mais que le vainqueur, en position de force, pouvait interpréter en fonction de ses intérêts du moment. Bien qu'elle fut située en zone libre, l'usine de Lyon, pouvait recevoir des visites de la commission allemande, qui disposait d'une importante antenne dans la métropole du Sud-Est. Certains matériels devaient être camouflés en prévision de ces visites. Georges Salomon évoque un support de sonar, étudié à Levallois, pour la Marine Nationale, par un certain Gruvel, et qui dut être plusieurs fois déplacé et dissimulé dans la cheminée inutilisée de l'usine, alors qu'il était encore disposé sur le plateau d'une machine-outil1.
Le camouflage physique était l'exception et non la règle. Il revenait aux différentes administrations françaises de prendre en charge un camouflage non pas physique, mais administratif lorsqu'un matériel, et il s'agissait généralement d'émetteurs ou récepteurs de radio, pouvait faire l'objet d'une commande civile, PTT ou marine marchande (Voir les camouflages du commandant Labat). Les réquisitions que parviendra finalement à exécuter, en 1944, la radio allemande concernera du matériel authentiquement civil, quatre émetteurs cachés en magasin et qui étaient primitivement destinés à Saïgon et à Beyrouth. Deux émetteurs du même type qui échapperont à la vigilance allemande serviront à diffuser Lyon-Libre à la Libération2.
Risquons nous maintenant à passer en revue les différents matériels militaires qui sont passés par l'usine de Lyon.
Pour la Marine, d'une façon générale, un certain nombre de contrats ont été reformulés sous forme de contrat avec la marine marchande. Interrogé après la libération, le donneur d'ordre, le capitaine de vaisseau Jean Malgouzou donnera la liste de matériel suivant: 20 récepteurs de trafic à ondes longues, 15 radiogoniomètres, 25 variomètres pour radiogoniomètres, 55 amplificateurs autodynes pour écoute sous-marine, 4 émetteurs périscopiques pour sous-marin, 10 émetteurs 3 KW ondes moyennes, 20 émetteurs mixtes, 10 ensembles de magnétostriction. En plus de ces matériels, il y a eu le gros marché d'études concernant le radar, évoqué au chapitre 4 (Histoires de radars)3.
Pour les services de transmissions de l'armée de terre en Afrique du Nord, dépendant du colonel Guérin, la SFR a livré du matériel aux normes ECMT:
92 émetteurs E26bis, modèle 1939
109 récepteurs R15 complets et 141 incomplets
80 ondemètres R26 ter. 170 appareils, non livrés ont été stockés à la SONERA de Puteaux
80 récepteurs R30 complets, 170 incomplets restant à Suresnes.
58 des émetteurs E26bis qui n'ont pu être expédiés avant novembre 1942 ont été entreposés chez Electro LL à Toulouse puis, en janvier 44, lors de l'ordonnance allemande concernant l'interdiction de tous les postes militaires, le colonel Labat avait demandé que ces ces émetteurs soient transférés et cachés à Toulouse, ce qui fut fait, sous des sacs postaux, par les soins de l'adjudant Gousset, de l'établissement central du génie, et d'un ingénieur de la SFR. Une deuxième tranche de construction a du être stoppée en novembre 42. Toutes les pièces ont été approvisionnées à la demande du colonel Labat bien qu'aucun marché n'ait été régulièrement passé.
Le gouverneur militaire de l'Algérie a reçu 15 ondemètres A409 de gamme standard, alors que 15 autres à gamme spéciale, qui n'avaient pas pu être livrés à temps, ont finalement été dirigés vers la DRCT des PTT, à la demande du colonel Labat.
30 émetteurs BEC 3/20 et 12 récepteurs BRC 1/8 pour l'AOF ont été fabriqués à Cholet et expédiés à Bordeaux en 1941 afin d'éviter toute réquisition allemande. Seuls 8 BEC et 6 BRC ont pu parvenir à Alger, via Marseille. Les autres sont restés cachés à Marseille.
1Souvenirs de Georges Salomon, archives AICPRAT.
2Lettre de J.Testavin, 16/5/49, Instruction 3eme partie, (AN Z/6 NL/9910-A)
3 Lettre du 18 février 1948 du capitaine de vaisseau Jean Malgouzou, Instruction 2eme partie, (AN Z/6 NL/9910-A