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BEAUDREVILLE (GOMETZ-LA-VILLE) (Mise à jour mars 2011)

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Le Hurepoix

 

 

           La première implantation du dispositif clandestin du Hurepoix fut une maison rurale, une fermette sur un terrain de 2000 mètres carrés, située au Hameau de Beaudreville, commune de Gometz-la-Ville. Elle avait été louée dès septembre 1940 à une institutrice d'Issy-les-Moulineaux.

Au cours de l'hiver 1940-41, Victor installa une imprimerie dans la ferme de Beaudreville. Pour acheminer le matériel, il mit a contribution le cheval qu'il avait fait venir de Bretagne.

 

ci-contre, le passage difficile de la côte de Gometz

      A cette époque, Arthur  Dallidet s'efforçait de doter le Parti d'une infrastructure rurale lui permettant de subvenir aux besoins essentiels, à savoir nourrir des militants et produire de la littérature. Les camarades Raoul et Henriette Neunlist  étaient imprimeurs, mais ils eurent tôt fait de s'initier aux rudiments de la vie à la campagne. Comme tant d'autres citadins transplantés, ils aménagèrent sur leur lopin un potager, quelques cages à lapins, un poulailler, suffisamment pour qu'on puisse y prélever assez régulièrement une bête qui devait avoir l'honneur de participer au redressement physique et moral d'une maisonnée de clandestins. L'imprimerie était prévue pour le dépannage, en cas de coups durs, en marge de l'imprimerie centrale de Maurice Prigent , dans le 12ème arrondissement. A la même époque, Arthur disséminait d'autres implantations de ce type autour de Paris.

            Le cheval breton, que Victor reçut à Vaugirard, et par la suite unique employé de la société de transport Teulet, fut mis à contribution pour le transport de l'imprimerie. Raph avait fait le chargement à Clamart, où était entreposé le matériel, et Victor le conduisit à Gometz, mais, à deux kilomètres de l'arrivée, lorsqu'il faut quitter la vallée de l'Yvette pour grimper sur le plateau, la redoutable côte de Gometz-le-Châtel représente un obstacle redoutable pour les cyclo-touristes mal aguerris et les équipages trop chargés. Le cheval, pas très costaud, et sans doute affaibli par les rationnements, fatigué et peut-être même "réactionnaire", stoppa tout net au milieu de la côte. Raoul Neunlist , qui s'était joint à l'équipée, était parti en quête d'un autre cheval quand les gendarmes arrivèrent. La charrette était heureusement bâchée, et Victor qui ne se démontait pas facilement, sut apitoyer la maréchaussée avec une histoire de cuisinière à charbon. Grâce au renfort des deux gendarmes, le chargement fut hissé sur le plateau, mais le cheval qui n'était finalement pas si crevé, agacé par la présence de la jument que Raoul avait réussi à dégotter, s'en prit à Victor qui dut faire entendre raison à la bête en saisissant un manche de pelle qui traînait opportunément par là. On n'entendit plus parler du cheval dans l'histoire du dispositif clandestin.

            Raoul et Henriette venaient de Malakoff, ils avaient dû rompre tous leurs contacts, camarades de Parti ou famille, en bref, disparaître de la circulation. Jusqu'en 1943, ils auront dû payer leur supplément de lapin et de pommes de terre au prix fort de la solitude à deux et de l'isolement. Leur petite ferme sert parfois, mais très rarement de maison d'hôte pour les très rares visiteurs de Duclos ou de Frachon. En fait, pour autant que l'on sache, cela est arrivé trois fois. Le premier visiteur a été  Fernand Grenier, en décembre 1942, avant de partir pour Londres comme délégué du parti communiste auprès du général de Gaulle.Grenier écrira dans ses mémoires: "Je suis en face des deux hommes auxquels aboutissent, en définitive, tous les fils d'une organisation tissée de Dunkerque à Marseille, de la Bretagne à l'Alsace, grâce à laquelle tant d'hommes et de femmes continuent inlassablement la lutte ... Dans cette petite cuisine de ferme, voici deux des dirigents dont la tête est mise à prix par la Gestapo ...

            On comprend l'intérêt d'une rencontre directe avec ses dirigeants pour l'homme qui va représenter le Parti à Londres. La même nécessité se fit sentir un peu plus tard lorsque commence à prendre forme les contacts amorcés entre les deux factions de la CGT, ennemies depuis septembre 1939: L'ancienne CGTU animée par les communistes et la CGT majoritaire, plus ou moins dans la mouvance socialiste. Henri Raynaud, syndicaliste de la CGTU jouera un rôle de première importance dans les pourparlers qui aboutiront aux accords du Perreux, en avril 1943. Pendant plusieurs mois, le petit, loquace et souriant, Henri Raynaud  prend pension chez les Neunlist, à quelque huit kilomètres de Forges-les-Bains, chez Frachon qui vient le voir et avec qui il communique fréquemment. Par la même occasion, il tient compagnie aux Neunlist, sa présence étant de nature à insuffler une dose minimum d'agitation pour ne point sombrer dans la neurasthénie.

        En novembre 1943, l'imprimerie de Beaudreville servit à nouveau de lieu de rencontre entre Jacques Duclos et Benoît Frachon d'une part et Pierre Villon et André Mercier d'autre part, pour préparer la proposition de programme que Villon ferait au Conseil National de la Résistance (CNR) au nom du Front national . Le brouillon esquissé par Duclos et Villon est la première version du Programme du  CNR. C'est la seule fois que des responsables communistes étaient autorisés à venir rencontrer Duclos dans le réseau de planques du Hurepoix. Pour André Mercier, il s'agissait aussi de préparer son départ pour Alger où il devait sièger à l'assemblée consultative dès sa première séance en novembre 1943.

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