Illustrations | Le Hurepoix | Les communistes sous l'occupation | La direction du PCF dans la clandestinité | accueil Site EdC |
Les Circuits de Communication du Parti en 1943
Sur cette page | Voir Aussi |
Une connaissance exacte des tournées de Victor permettrait une
reconstitution fidèle de toutes les communications de Duclos. Nous disposons
seulement de souvenirs restitués plus de cinquante ans après les événements.
Victor ne connaissait souvent que des pseudonymes et la liste qui ressort de son
récit est elle-même une reconstitution a posteriori élaborée d'après des
informations obtenues après la Libération. Néanmoins, le circuit-Victor
illustré sur le graphe des communications peut être considéré comme très
probable. Il mérite que l'on s'attarde sur chacun de ses noeuds.
L'essentiel
des contacts avec le Parti passent par l'intermédiaire de Lecoeur et Chaumeil
.
Il est peut-être arrivé que Victor communique directement avec des envoyés
des inter-régionaux, mais ces contacts transitaient normalement par Lecoeur qui
exerçait vis-à-vis de l'intérieur du Parti les fonctions d'un premier
ministre. Par ailleurs, Lecoeur maintenait des contacts réguliers avec
Gronowski
,
le dirigeant de la M.O.I., dans un pavillon de Clamart, et avec Pauriol
,
l'organisateur du parc de radios.
Victor
avait des contacts avec des camarades qui faisaient la navette avec la zone Sud,
sous le couvert d'un commerce de crayons. La fameuse ligne de démarcation qui a
partagé le pays en deux a nécessairement marqué le Parti et les FTP même après
l'invasion de la zone Sud.
Les
liaisons nécessitées par la publication de la presse clandestine étaient les
plus régulières. Duclos et Frachon sortaient leurs papiers à peu près chaque
semaine, c'était en quelque sorte leur devoir minimum. La grosse Marie
dirigeait normalement les textes pour l'Huma et la VO sur l'imprimerie de
Prigent
.
Par ailleurs Victor archivait chaque numéro de ces publications dans des vases
en grès qu'il dissimulait dans la cave de la maison de la rue Reulos, à
Bagneux, où il avait déjà dissimulé les petits carnets d'Arthur
.
La
liaison avec Jean Jérome
prit
fin en mars 43 ou en avril 43 avec l'arrestation de l'intéressé. Le rôle
exact de Jean Jérome ne pourra sans doute jamais être établi avec précision.
Il joua certainement un rôle de première importance pour les finances du
Parti. Il fut remplacé, pour une partie de ses attributions par Waldeck
Lhuillier
qui
devint trésorier du Parti et des FTP. Les problèmes d'approvisionnement et de
financement évoluaient rapidement. On conçoit bien que la montée en puissance
des FTP et de certains groupes armés plus directement liés au Parti ait pu déboucher
sur de nouvelles sources. Son rôle de financier amenait Jean Jérome à avoir
des contacts avec les FTP et avec la MOI. Il fut impliqué, également, dans la
formation du Front National, c'est à dire dans les contacts avec les cercles de
sympathisants extérieurs au Parti, ce qui lui donna également un rôle de
première importance dans les premiers contacts avec les gaullistes. Le maintien
d'un contact étroit avec Jean Jérome permettait donc à Duclos de doubler
beaucoup de transmissions qui passaient normalement par ses subordonnés directs
comme Lecoeur et Tillon.
La
M.O.I., (Main-d'Oeuvre Immigrée) désigne tous les groupes communistes de
diverses nationalités autre que française. Dans l'organisation du mouvement
communiste, la M.O.I. n'est pas intégrée au Parti national, mais dépend
directement du Komintern. La M.O.I. était dirigée par un triangle à la tête
duquel on trouve Louis Gronowski
,
un Juif Polonais, pendant toute la durée de la guerre. Au sein de la M.O.I.,
chaque groupe national, juif, tchèque, espagnol etc... était organisé avec
son propre triangle de direction. Dans ses mémoires, Gronowski ne fait pas état
de contacts directs avec Fried
.
Dans l'appareil du Komintern, le supérieur de Gronowski aurait donc été
Duclos, ce qui n'exclut pas que des interventions directes aient pu survenir de
la part d'autres agents du
Komintern à Paris sur certaines branches de la M.O.I.
Le
parc radio est encore un secteur sur lequel on doit se résigner à admettre
beaucoup de zones d'ombres. La période de l'occupation n'est qu'un épisode de
son histoire, c'est-à-dire qu'avant et après, il ressort d'une activité illégale,
l'émission de messages à destination de puissance étrangère en-dehors des
bandes de fréquence radio-amateur étant fermement réprimée par la loi.
Jusqu'en juin 41, l'usage des transmissions radios n'avait pas de caractère de
nécessité, puisque les communications avec Moscou pouvaient emprunter sans
problème le canal des ambassades soviétiques de Paris ou de Bruxelles, comme
ce fut le cas en juin et juillet 40. Néanmoins, Fernand Pauriol, un journaliste
marseillais mit sur pied un service radio qui devint opérationnel en Mai 41.
Quand Lecoeur devint responsable de l'organisation, à partir de 1942, il
supervisa le service de Pauriol pour lequel il recruta beaucoup d'anciens radios
de France-Navigation originaires de Boulogne-sur-mer. Deux d'entre eux, Marcel
Rolland
et
Jean Le Brun
furent
arrêtés en Janvier 43; ils avaient commis une imprudence en communiquant entre
eux en breton pour des affaires privées. Le service de Pauriol travailla également
pour l'Orchestre Rouge, le célèbre réseau de renseignement soviétique de
Trepper
.
D'après les témoignages de Victor et de Manolita
,
il apparaît que les messages de Duclos sont prioritairement dirigés sur
Draveil où Julienne, alias Antonine Le Lay
assure
le chiffrage. Les messages chiffrés sont ensuite pris en charge par le service
radio. A la suite d'accords entre les Soviétiques et les Anglais, l'ambassade
soviétique de Londres était parfois utilisée comme relais. En zone Sud,
Raymond Guyot
a
été parachuté en Janvier 42, avec un émetteur assez puissant pour atteindre
Moscou. Une ancienne secrétaire de France-Navigation, Francine Fromont
,
en est l'opératrice spécialement formée à Moscou. Elle tombera le 30 Juillet
43.
Autre responsable important dans le monde communiste, Pierre Villon
,
de son vrai nom, Roger Ginsburger, était, après son évasion en janvier 42, le
secrétaire général du Front National. Il déclare avoir entretenu avec Duclos
une correspondance régulière, une ou deux fois par semaine. Il n'était pas
desservi directement par Victor, mais sans doute par Jean Jérome
qu'il
voyait chaque semaine ou par Lecoeur avec qui il était en contact régulier. Le
Front National était un mouvement
de résistance "indépendant" créé par le Parti. Le mouvement
communiste se plaît à engendrer de telles organisations chaque fois qu'il sort
d'une ligne sectaire, pour concrétiser une nouvelle ligne d'alliance avec
d'autres forces "de progrès". Cette organisation quelque peu
artificielle répondait à un
besoin réel de la part d'un certain nombre d'intellectuels d'adhérer à
quelque chose d'unitaire. Ainsi, le Front National put-il regrouper des
compagnons de route comme Mauriac
ou
le professeur Debré
qui
n'étaient pas hostiles au Parti, ou comme Joliot
,
carrément adhérents ou sympathisants très proches. Du point de vue du Parti,
Villon, juif alsacien de 42 ans, était quelqu'un de très sûr, avec une
probable implication au sein du Komintern remontant à la fin des années 20. Au
printemps 43, Villon participa activement à la création du CNR, où son
influence devint prépondérante après la disparition de Jean Moulin. En mai 44
le CNR le nomma président du COMAC, une structure qui coiffait toutes les
organisations armées de la Résistance.
La répartition des tâches au sein du secrétariat n'est pas tout à fait claire. Frachon avait bien sûr en charge le secteur syndical et Tillon les FTP et ils disposaient chacun d'une grande autonomie leurs domaines respectifs. Mais ils avaient également d'autres responsabilités relevant de la vie du Parti. Ainsi Tillon était-il en charge de la trésorerie et du secteur international. Pour la trésorerie, on imagine bien une organisation tricéphale, avec Jean Jérome pour l'approvisionnement, Duclos pour les décisions et Tillon pour une certaine comptabilité, mais on hésite sur le contenu précis du secteur international dont Tillon est censé être le responsable.
Une organisation léniniste ne se conçoit pas sans un centre. Le centre
a été établi dans le Hurepoix, c'est le domaine de Raph. Sur le schéma, j'ai
représenté le centre par un cercle plutôt que par un triangle, car un certain
nombre de sites supplémentaires ont été rattachés à la direction, en plus
des sommets du triangle. La communication interne au sein de ce petit monde
tient à la solide constitution de Raph, plus particulièrement de ses jarrets.
Un peu comme au siège des grandes sociétés, on garde au chaud dans des
placards des cadres supérieurs qui n'ont plus de responsabilités très
importantes, mais dont le rang exige qu'on les ménage, et qui rendent quand même
de petits services, le cercle central s'est étoffé de quelques têtes
nouvelles: Marcel Cachin
,
Georges Cogniot
,
Henri Raynaud
,
et Julien Racamond
.
Marcel Cachin
,
74 ans et une belle paire de moustaches blanches, symbolisait la continuité du
mouvement ouvrier de la S.F.I.O. de Jaurés à la S.F.I.C. de Thorez
.
Membre du bureau politique depuis 1922, mais se cantonnant depuis longtemps dans
la fonction affective de grand-père du Parti, d'autant plus populaire qu'à sa
gentillesse, il ajoutait les dons d'un magnifique orateur. Son âge canonique,
sa popularité et son honorabilité de sénateur lui avaient valu d'échapper à
toute arrestation jusqu'en septembre 41 où les Allemands l'arrêtèrent et lui
firent signer un désaveu des attentats individuels perpétrés depuis quelques
semaines par Fabien
et
ses copains des bataillons de la jeunesse. Ce désaveu fut naturellement
abondamment placardé sur les murs et aurait dû valoir à l'intéressé une
rupture globale avec le Parti, mais Cachin et le Parti avaient trop besoin l'un
de l'autre, ils se réconcilièrent. Après que les Allemands l'eurent libéré,
le vieil homme s'était retiré en Bretagne avec son épouse. C'est là que
Fabien
,
à la tête d'une escouade de FTP, vinrent
enlever le couple.
Raph prit en charge le ménage Cachin
en
septembre 42, à la gare de Malakoff. Il les conduisit dans son gazo jusqu'à
Verrières-le-Buisson où un pavillon avait été préparé à leur intention. A
Partir de 43, on put rajouter en première page de l'Huma "Directeur,
Marcel Cachin". Raph visitait les Cachin une fois par semaine et leur
apportait du ravitaillement et des documents.
Les Cachin
déménagèrent
à Bourg-La-Reine quelques mois après leur arrivée à Verrière pour faire la
place à Georges Cogniot
qui
s'était évadé en juin 42 du camp de Compiègne Royal-Lieu avec dix-sept
autres détenus. Cogniot, normalien de 41 ans, était l'ancien rédacteur en
chef de l'Humanité. Cachin et lui furent en quelque sorte les conseillers
Particuliers de Duclos avec lequel ils correspondaient pour échanger sur les
affaires du monde. Ils collaborèrent évidemment à l'élaboration de l'Humanité
clandestine, mais Duclos en fut toujours le principal rédacteur.
Le petit Henri Raynaud
,
53 ans, avait assumé avant-guerre de nombreuses responsabilités dans la
direction du Parti, mais surtout à la CGT, aux cotés de Benoît Frachon.
Interné dès octobre 39, il devait se retrouver au camp de Chateaubriant d'où
il s'évada en juin 41 aux cotés de Fernand Grenier
et
Eugène Hénaff
.
Il fut longtemps caché à Paris chez Jeanne Ecolan
,
dite Flora, mère de l'écrivain Christiane Rochefort
.
Flora faisait partie de l'équipe Dallidet, et nous la retrouverons chez
Frachon, à Forges-les-Bains où elle séjournera quelques mois. Frachon fit
d'Henri Raynaud son adjoint pour les affaires syndicales. Pour faciliter les
contacts, Raynaud prit pension à Beaudreville (Gometz), chez les Neunlist
.
Frachon récupéra également Julien Racamond
,
un autre syndicaliste de 58 ans, à qui les Allemands avaient extorqué, comme
à Cachin
,
un désaveu des attentats individuels. N'ayant pas le prestige de Cachin, il
s'en fallut de peu qu'il ne bascula définitivement dans le camp des traîtres
aux yeux du Parti, mais Frachon avait l'esprit de fidélité envers ses vieux
copains de la CGT, il pardonna les incartades, et il demanda à Raph de le loger
quelque part. "Raca" était une vieille connaissance de Raph, qui
avait été en 1939 son chauffeur très politique, souvenons-nous, sur
recommandation spéciale de Fried
.
Il restait dans le dispositif de Raph une place vacante à Meulan dans la ferme
tenue par Robert Le Maout
.
Raca fut donc installé à la campagne, mais à une bonne distance du
Saint-des-Saints, signe indiscutable qu'il n'avait réintégré que le
purgatoire. Chaque aller-retour au purgatoire coûtait 120 Km supplémentaires
à Raph.
Aujourd'hui, en 1996, avec les moyens modernes de communications: téléphone, fax, courrier électronique, vols internationaux, on arrive à faire travailler sur les mêmes projets des personnes basées sur des sites différents. En 1943, Raph parvenait à peu près au même résultat avec un vélo aux pneus plus que médiocres, un gazo poussif et malodorant et un cheval hargneux. Le service du courrier interne au sein de la direction n'a connu aucune interruption tout au long des trente mois qui ont suivi l'arrestation de Raph. Sur son vélo, il portait en bandoulière une grande besace avec des boites de macaronis où il dissimulait tout un tas de petits billets numérotés selon l'ordre des rendez-vous. Les trois sommets du triangle majeur sont desservis deux ou trois fois par semaine, les satellites secondaires peut-être un peu moins fréquemment. Souvent, sa mission ne s'arrête pas à la distribution du courrier, il doit aussi sonder verbalement ses interlocuteurs. C'est normalement Victor qui assure les liaisons avec Lecoeur, mais Raph est chargé de la mission quand le message ou la question requiert un commentaire ou un entretien.
Reprenons notre schéma de circulation de l'information. Le circuit
central desservi par Raph communique avec l'extérieur par deux bretelles
principales. Si la première s'appelait l'avenue Victor, la seconde serait
l'avenue Marie-Claire, elle conduit aux FTP. Comme Victor, Marie-Claire effectue
des liaisons quotidiennes. Elle n'habite pas avec Tillon, mais le rencontre
chaque jour.
Cinquante ans plus tard, Marie-Claire se montre autrement moins loquace
que Victor. Elle a vécu une époque exceptionnelle à une place exceptionnelle,
mais n'en garde aucune nostalgie, et ferait
presque profession de s'en désintéresser. De la période de la Résistance,
elle conserve un souvenir grisâtre de privation et de trouille permanente. Elle
ne fut pourtant pas moins courageuse qu'une autre ou qu'un autre, mais la
consigne de silence qu'elle s'imposa semble tenir encore.
On ne saura donc rien d'autre de la tournée de Marie-Claire, sinon
qu'elle passait voir son beau-frère chaque matin, et qu'elle prenait souvent le
métro à Saint-Rémy-lès-Chevreuse. Sa maison était d'ailleurs située tout
près de la gare de Saint-Rémy. Les mémoires de Marcel Prenant ou de Jean Jérôme,
ou le témoignage oral d'Ouzoulias attestent
des multiples liaisons de Marie-Claire. Elle rencontrait très régulièrement
les agents de liaisons de chaque membre du CMN, c'est-à-dire Prenant,
Ouzoulias, Hénaff
,
puis quand il sera "mis au vert", Camphin
.
Quant à Georges Beyer
,
son mari, elle n'avait en principe pas à faire trop de chemin à faire pour le
contacter.
Charles Tillon vivait beaucoup moins reclus que ses collègues Duclos et
Frachon. Il se déplaçait souvent pour des entretiens personnels. "Les
courses à vélo nécessitaient autant de vigilance épuisante que les
rendez-vous sur la ligne de Sceaux", écrit-il dans ses mémoires. Il
lui arrive de rencontrer Lecoeur pour régler des différents qui naissent si
facilement entre les intérêts du Parti et ceux des FTP. Jean Jérome
est
également un interlocuteur nécessaire
dans le domaine de l'argent qui, dit-on, est le nerf de la guerre. Jean Jérôme
raconte qu'il coucha un jour à Palaiseau au 257, rue de Paris, dans le même
lit que Pierre Villon
,
responsable du Front National. Tillon avait eu l'idée, "...pour
donner aux FTP, créés par le PC une couverture plus large... de les faire
parrainer par le Front National." Comme Tillon et Villon le
reconnaissent chacun, cette affiliation n'avait aucune conséquence au niveau de
l'organisation. Il n'y aurait eu qu'une seule rencontre entre les deux hommes,
suffisante pour que les FTP se déclarent les "soldats du FN" et que
des contacts plus fréquents soient initiés entre Villon et des responsables
des FTP tels que Camphin
ou
Beyer
.
Tillon fait également état, pour l'année 43 de déplacements à
Versailles qui semblent réguliers :"...A
courir la région entre Limours, Palaiseau et Arpajon dans le Hurepoix, j'étais
devenu un cycliste infatigable. A la belle saison, je circulais souvent avec une
boite de peintre sur mon porte-bagages, pour justifier vis-à-vis des voisins ma
bougeotte de soi-disant artiste. Bientôt, nous devrons, Colette et moi, voyager
sur un tandem pour aller jusqu'à Versailles, parce que nos services de
renseignements signalaient qu'un client de l'autobus entre Saint-Rémy et
Versailles me ressemblait comme un frère...". Est-ce que ces déplacements
étaient motivés par l'activité des FTP, ou par d'autres responsabilités échues
à Tillon dans le cadre du secrétariat du Parti ? On a du mal à trancher. D'un
coté, on a l'impression que Tillon était presque entièrement investi dans les
FTP, mais d'un autre coté, Albert Ouzoulias garde le souvenir d'un Tillon
n'ayant guère de contacts directs avec le terrain en-dehors des réunions
mensuelles ou bimensuelles du CMN. Il
y a sans doute un peu des deux aspects dans la réalité: Les contacts de
terrain devaient passer normalement par Ouzoulias, Camphin
et
Beyer
,
et entre deux réunions du CMN, les communications de Tillon avec les FTP étaient
transmises par Marie-Claire, mais
Tillon avait également des entretiens individuels, par exemple avec Prenant, ou
suscitait des réunions pour régler des problèmes Particuliers.
Pour ce qui est des contacts militaires avec le BCRA de Londres, Marcel Prenant a pris la succession de "Joseph" Beaufils , en raison de ses titres universitaires et militaires plus prestigieux. Tillon l'a affublé du titre de chef d'état-major des FTP, pour faire bonne figure dans des réunions où les militaires donnent souvent le ton.
Pendant l'occupation, l'activité syndicale n'est pas suspendue. C'est un
aspect de la Résistance que l'on aurait tendance à oublier. Disons simplement
que dans un pays occupé, c'est-à-dire asservi pour produire, au bénéfice des
Allemands, le maintien d'un syndicalisme libre conduit très vite à
l'affrontement avec l'occupant.
Pour communiquer avec les différentes instances de la CGT, Frachon
utilisait parfois le canal du Parti, c'est-à-dire qu'il dirigeait d'abord son
courrier sur Villebon, et de là, Victor le remettait dans un autre circuit. Tel
était le cas des aller-retours avec l'imprimerie, pour la réalisation de la
VO, mais sans doute, les liaisons avec les régions, qui transitaient par
Lecoeur ont-elles pu être également utilisées pour les communications entre
Frachon et la CGT. Quand Henri Raynaud
séjournait
à Gometz, il était en contact assez étroit avec Frachon: ce dernier venait le
voir à pied, et de plus, il restait sur le cercle central desservi par Raph. On
n'avait pas logé Raynaud à Gometz pour qu'il y reste reclus, mais au contraire
pour qu'il puisse assurer des contacts directs que les impératifs de la sécurité
interdisaient à Frachon. Marie-Claire se souvient d'avoir reconnu Henri
Raynaud, sur la ligne de Sceaux.
"...J'étais dans le métro, un jour, et j'ai entendu dans le métro un
monsieur qui parlait avec quelqu'un avec un accent rocailleux, je l'ai situé
tout de suite, c'était le secrétaire de la maison des syndicats, on l'appelait
Riri. J'avais travaillé au syndicat, à la CGT..."
Marie-Claire ignorait naturellement la présence de l'imprimerie de dépannage
de Gometz, et a fortiori que Raynaud
y
résidait. Henri Raynaud n'était pas l'agent de liaison de Frachon, mais plutôt
son bras-droit. Il joua un rôle important, sur le terrain, pour la deuxième réunification
de la CGT, concrétisée dans ce que l'on a appelé les accords du Perreux.
Raoul Neunlist
,
l'imprimeur de Gometz lui servit souvent d'agent de liaison.