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Duclos travaille à l'Oasis (Villebon/Yvette)
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Jacques Duclos dicte son courrier à sa femme Gilberte. Blanche Voisenet faisait également des travaux de dactylographie.
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Lieu de
travail : premier étage
Cinquante ans plus tard, les lieux n'ont guère changé, on peut encore
voir au premier étage le renfoncement où Aimé Voisenet, le
bricoleur, avait aménagé la cache. Les différents occupants de la maison
n'ont pas abattu de cloisons, si bien que l'agencement des pièces est resté en
l'état. De l'autre coté de la cache par rapport au couloir, le domaine de
Jacques Duclos consiste en une petite suite de deux pièces donnant en plein
Sud, une chambre à coucher communicant directement avec une autre pièce
vaguement aménagée en bureau, où l'on avait installé tant bien que mal deux
machines à écrire sur un mobilier hétéroclite. C'est ici qu'un homme d'un mètre
quarante neuf a dirigé pendant presque trois ans une organisation clandestine
de plusieurs dizaines de milliers de militants. Privé de tout contact direct
en-dehors des réunions mensuelles du secrétariat, Jacques passe ses journées
à écrire. Le plus souvent, il n'écrit pas lui-même, mais dicte son courrier
à Gilberte ou à Blanche Voisenet, parfois aux deux en même temps. Les
dactylos noircissent le papier pelure que Victor emportera dès le lendemain
pour que le courrier parvienne à ses destinataires en moins d'un jour pour la région
Parisienne, et en trois ou quatre jours pour la Province.
Comme le bureau donne directement sur la rue, il faut couvrir les crépitements des machines par une T.S.F. qui répand généreusement sur le quartier les émissions de Radio-Paris. Jacques déambule et s'aide de ses mains pour mettre en forme sa pensée et la traduire en instructions précises que réclament les différentes instances du Parti. Chaque jour, ce sont plusieurs dizaines de pages manuscrites ou dactylographiées qui sortent du premier étage de l'Oasis. Même si Lecoeur règle directement sur le terrain beaucoup de problèmes, un très grand nombre de décisions remontent jusqu'à Duclos, et en premier lieu, tout ce qui ressort directement de l'autorité du Komintern. Gronowski , par exemple, le dirigeant de la MOI reçoit un courrier de Duclos tous les mercredis et samedis. Les responsables sur le sol français qui correspondent avec Duclos ne connaissent d'ailleurs pas sa véritable identité, à quelques exceptions près. Ils envoient simplement leur courrier à "Fred", lequel, en revanche est connu de ses correspondants à l'étranger: Grenier à Londres, ou Marty à Alger, à partir d'octobre 43, et bien entendu, le groupe de Moscou, avec Dimitrov, Manouïlski et Thorez . Tous ces gens-là ont l'habitude de rédiger des rapports assez volumineux. Par exemple, un mois après la dissolution de l'Internationale, en Juin 43, Dimitrov reçoit de Duclos un texte de 12 feuillets où il évoque, pour argumenter son approbation de la dissolution, tous les ancêtres du communisme français, depuis Babeuf et Saint-Simon. Les courriers, une fois codés, empruntent souvent des chemins tortueux. Marty fait passer par Moscou ses messages pour Duclos, mais souvent, la ligne entre Moscou et Villebon passe par l'ambassade soviétique de Londres. Duclos rédige l'essentiel des publications nationales du Parti: L'Humanité, bien sûr, mais il se fait un peu aider par Cachin et Cogniot, en réserve dans le dispositif de Raph, mais aussi, "la Vie du Parti", publication interne, organe où les directives sont explicitées noir sur blanc.
De son bureau de la route du Plan, Jacques est relié aussi bien à
Moscou qu'aux dernières ramifications du Parti. Il peut expédier des messages
personnels jusque dans les prisons, comme celui que Mounette
recevra
à Rennes, par l'intermédiaire de son avocat: "Les
jours les plus noirs de l'hiver n'annoncent-ils pas le plus doux des printemps ?".
Gilberte Duclos traite directement certaines
questions d'intendance. Par exemple, c'est à elle que Raph rend compte des dépenses
de son secteur. Il semble que des sommes d'argent assez importantes aient
transité par l'Oasis. On se souvient que le jour où Victor faillit être
interpellé à Créteil, la valise préparée par Aimé et abandonnée ensuite
par Victor, était pleine d'argent. Sans doute, la plupart des transferts
pouvaient-ils être arrangés directement entre Jean Jérôme et les
responsables des différents secteurs, mais le parc de l'Oasis était
suffisamment vaste pour que des réserves y soient enterrées, et ces réserves
étaient suffisamment importantes pour qu'à la fin de la guerre, on oublie une
cassette d'or; nous en reparlerons.