HISTOIRE DU PCF (1921-1939)
Cette page
est constituée d'extaits du livre "La Direction du PCF dans la Clandestinité (1941-44)"
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Congrès de Tours et début du PCF |
1920
Le congrès de Tours, les débuts du parti communiste
En 1920, une majorité des militants socialistes de la SFIO réunis en
congrès à Tours décident de s'affilier à la troisième internationale, fondée
à la suite de la Révolution d'Octobre. Le Parti Communiste Français qu'on
appelle alors Section Française de l'Internationale Communiste (SFIC) est ainsi
créé: il se proclame bolchevique, révolutionnaire, et accepte par conséquent
de se soumettre aux conditions explicitement formulées par le comité de la
troisième internationale dirigé par Lénine
.
La SFIC s'engageait donc à construire un parti révolutionnaire,
qui peut utiliser des moyens légaux, mais qui doit se doter d'un appareil
clandestin et ne doit pas exclure l'action illégale. Le parti constitué devait
être discipliné, suivant les règles
du centralisme démocratique: les minoritaires doivent suivre la ligne décidée
majoritairement, et n'ont pas le droit de s'organiser pour défendre leur
tendance. Internationaliste, enfin,
un parti national, comme le Parti Communiste Français (PCF) est d'abord une
section de la troisième internationale. Le PCF sera d'ailleurs appelé SFIC
(Section Française de l'Internationale Communiste). Ces principes de base vont
sous-tendre toute la vie du PCF jusqu'en 1939.
On estime à 120 000 le nombre d'adhérents qui avaient rejoint le
nouveau parti, alors que la vieille SFIO n'en comptait plus que 40 000, tout en
conservant néanmoins la majorité de ses députés et de ses élus locaux. La
scission au sein de la SFIO devait entraîner un an plus tard une scission du
syndicat CGT, mais cette fois, les partisans de l'Internationale Communiste qui
fondèrent la CGTU étaient minoritaires.
1928
Classe contre classe
Les douze premières années du PCF furent mouvementées et un tant soit
peu confuses. C'était un parti révolutionnaire, gauchiste, comme on dira
couramment plus tard des groupes d'extrême gauche qui ont fleuri en mai 68.
L'action antimilitariste se développa auprès des jeunes, dans les casernes, à
l'occasion de l'occupation de la Ruhr en 1923 par les troupes françaises et de
la guerre du Rif, au Maroc en 1935.
Avec Duclos, Frachon et Thorez sont des hommes qui montent et qui prennent de plus en plus d'importance au sein du Parti. Comme Duclos, Maurice Thorez est passé dans la clandestinité à la suite d'actions antimilitaristes. Il a déjà effectué plusieurs séjours à Moscou. Entré au Bureau Politique en 1926, il assure la fonction de secrétaire à l'organisation.
En 1929, à 36 ans, Benoit Frachon devient
le doyen du secrétariat, aux cotés des 2 dirigeants des JC, Barbé et Célor
, tous
deux âgés de 27 ans, et de Thorez
, 29 ans.
1932
Le début du règne de Thorez
En 1931, Charles Tillon, membre du bureau confédéral de la CGTU,
effectue son premier et d'ailleurs unique voyage à Moscou. Il y sera reçu par
les dirigeants de l'Internationale, Manouïlsky et Piatnisky. Manouïlsky est
une vieille connaissance du Parti. Lénine
l'avait
envoyé clandestinement en mission en France en 1921, et il put intervenir au
congrès de Paris, faisant une profonde impression sur tous les délégués.
Depuis, c'est lui qui suit le PCF pour l'Internationale, dont il deviendra le
principal dirigeant jusqu'en 1934. Manouïlsky éprouvait des doutes sur le
bien-fondé de la ligne ultra-gauchiste et s'apprêtait à débarquer Barbé et
Célor
, les
jeunes dirigeants que nous avons vus propulsés à la tête du Parti pour
appliquer la ligne "classe contre classe".
Il s'en est fallu de peu que Maurice Thorez
ne
fut aussi écarté comme Barbé et Célor
, mais
c'est lui que Manouïlsky installa à la tête du Parti, au congrès de Paris en
1932. Duclos et Frachon comptent parmi les 10 autres membres du bureau
politique. Si on fait le bilan des 12 premières années d'existence du Parti,
les résultats ne sont guère époustouflants sur le plan électoral, ou du
nombre d'adhérents, mais d'un point de vue léniniste, la réussite est
incontestable: L'ensemble hétéroclite d'anarcho-syndicalistes, nébuleuse de
divers courants révolutionnaires s'est métamorphosé en un authentique parti
bolchevique. L'équipe dirigeante, jeune, issue de la classe ouvrière, est formée
de révolutionnaires professionnels, bénéficiant d'une solide expérience des
affrontements avec la police, de la clandestinité, mais sachant également
jouer des moyens légaux, par exemple les mandats de députés pour bénéficier
de l'immunité parlementaire. Ces dirigeants sélectionnés avec
"clairvoyance" par Manouïlsky, extrêmement brillants au départ, ont
reçu en outre une solide formation théorique au gré de leurs passages à
Moscou.
1936
Staline
,
Hitler
et le front populaire
En 1936, le PCF est intégré au dispositif de l'IC, adossée à l'URSS
dominée par Staline
. De nos
jours, ce nom, avec ses dérivés, "stalinisme",
"stalinien", évoque une variante historique de la tyrannie
sanguinaire et du totalitarisme, mais pour le communiste de 1936, grâce à une
direction "éclairée, ferme et stable", l'URSS s'affirme comme la
nation des prolétaires, consolidant les acquis de la Révolution par une marche
vers le progrès économique et technologique. Le Parti Français, à l'image du
grand frère soviétique, est doté, lui aussi, d'une direction "stable et
éclairée". Ses effectifs s'accroissent de mois en mois, il occupe un
espace politique toujours plus vaste.
A Moscou, à partir de l'assassinat de Kirov
, en
1934, les purges deviendront une pratique courante de gestion du parti. De 1934
à 1939, on estime à un million le nombre de ses membres qui seront exécutés
ou déportés. Mais à Paris, le délégué de l'Internationale, le représentant
de Staline, donc, est un tchèque élégant et raffiné, Eugen Fried
, qui
sait contrôler le Parti avec doigté en s'intégrant dans le trio de direction,
Thorez
, Frachon
et Duclos, eux-mêmes issus du choix "éclairé" de Manouïlsky.
Pourquoi le militant de base s'inquiéterait-il de ce que ses chefs soient nommés
par Moscou, s'ils sont bons ? D'ailleurs, le PCF n'est-il pas la Section Française
de l'Internationale Communiste, et l'URSS, le pays de la révolution accomplie,
la patrie de tous les travailleurs ?
Témoignage de Mounette
Dutilleul
sur l'époque:
" La répression et le manque d'argent, c'était beaucoup,
on voyageait en 3ème classe, avec des brochures sous le bras. Pour les frais
d'hôtel, on vendait les brochures sur la table de la salle de réunion, mais si
on ne les vendait pas, il n'y avait pas d'hôtel, il fallait coucher chez des
camarades, sur un divan, un sofa enfoncé. Et si on nous faisait à manger, c'était
bien, mais on n'allait pas chez des gens riches. Une vie de famille, dans ces
conditions, c'était difficile à mener. On a dit que nous étions des espèces
de robots, des gens pas très humains, mais il fallait bien prendre les moyens
de nos objectifs, car enfin, on voulait changer le monde, ce n'était pas rien,
on voulait monter à l'assaut du ciel. On ne se serait pas engagé comme ça,
pendant la guerre, avec tous les risques qu'on connaissait fort bien, si l'on
n'avait pas été sûr d'une grande victoire...
Hitler
avait
pris le pouvoir en Allemagne en janvier 1933. Le fascisme devint à l'ordre du
jour en Europe. Pour autant, l'IC, qui avait mis fin à la phase ultra-gauchiste
du PC en remplaçant Barbé par Thorez
restait
ferme dans sa ligne sectaire. L'union avec les sociaux-démocrates n'était tolérée
qu'à la base: Les ouvriers de la CGT, non communiste, étaient invités à
participer aux actions de la CGTU, communiste. Dans la France de 1934, c'étaient
les ligues d'extrême-droite qui représentaient le danger fasciste. C'est au
cours des journées de 1934 qui virent de très violents affrontements entre les
ligues, la police et les communistes, que s'imposèrent les sentiments unitaires
d'une Gauche antifasciste:
Le 6 Février 1934, les ligues envahirent la place de la Concorde. La
bagarre avec la police fut déclenchée quand ils voulurent franchir le pont de
la Concorde pour donner l'assaut à la chambre des députés. Raymond Dallidet,
responsable des jeunesses communistes (JC) à Boulogne, était aux portes des
usines Renault de Billancourt pour appeler les travailleurs à aller
contre-manifester. Refoulés par la police, ils ne purent atteindre la Concorde.
Arthur
et
Raymond furent embarqués par la police et passèrent la nuit au poste. Le 9 février,
les affrontements entre la police et les manifestants antifascistes firent 9
morts parmi les manifestants. La CGTU et la CGT appelèrent à la grève générale
le 12 février. Ce jour-là, au cours d'une manifestation commencée dans la
division, les cortèges socialistes et communistes fusionnèrent dans
l'enthousiasme, place de la Nation aux cris de "Unité! Unité!".
Jusqu'en Mai 34, cette manifestation unitaire resta sans suite. C'est Dimitrov
, nouveau
responsable de l'IC, et Manouïlsky qui réussirent à obtenir de Staline
un
revirement de l'IC, en faveur d'une alliance avec les sociaux-démocrates.
Dimitrov transmit les nouvelles consignes à Thorez
, à
Moscou en Mai.
D'après
J.P.Brunet, (Histoire du PCF)
|
1928 |
1932 |
1936 |
Adhérents |
50000 |
32000 |
235000 |
Parlementaires |
14 |
11 |
72 |
Permanents |
|
500 |
3000 |
Electeurs |
11.2% |
8.3% |
15.2% |
L'organisation
du PCF dans les années 36-39
En 1936, le PCF a atteint le stade final de son évolution, une forme
stable que l'on pourrait qualifier de Léniniste-Stalinien, c'est-à-dire qu'il
répond encore aux critères du bolchevisme tels qu'ils étaient définis au
moment du congrès de Tours, mais qu'il dispose maintenant d'une autorité suprême
qui permet de trancher éventuellement tous les débats et de résoudre tous les
conflits.
C'est une forme d'organisation qui a bien des avantages, puisqu'elle évite
d'enliser le grand nombre dans des débats stériles tournant souvent autour de
querelles de personnes. Ainsi fonctionnent les entreprises avec leurs P.D.G.,
les armées avec leurs généraux en chef et l'église avec un pape proclamé
infaillible pour la vie dès son élection. Si les communistes ne disent pas que
Staline
est
inspiré par l'Esprit Saint, ils le pensent sans doute. En fait, très peu de
dirigeants connaissent personnellement Staline. Ils reçoivent les directives de
l'IC, et Staline intervient dans les décisions de l'IC quand il veut, mais il
le fait surtout pour les choses importantes.
Le maintien des principes léninistes implique la
coexistence de 3 appareils distincts: L'appareil légal
est celui qui apparaît à l'issue des congrès, avec son Bureau Politique, son
Comité Central, son organisation en cellules, rayons, responsables départementaux,
interrégionaux, ses élus, députés ou maires. L'appareil illégal doit permettre au Parti de supporter une interdiction,
comme un groupe électrogène normalement éteint est prêt à démarrer en cas
de coupure de courant. Il consiste donc en un dispositif clandestin de planques,
d'imprimeries, des moyens financiers à l'abri d'une saisie, avec quelques
dirigeants n'ayant aucune fonction officielle. L'appareil de l'IC
contrôle sur le territoire Français des militants qui sont rattachés
directement à l'IC, sans aucun rapport structurel avec la section française,
c'est-à-dire avec le PCF. Ainsi, les étrangers sont organisés à l'époque
dans la M.O.I. (Main d'Oeuvre Immigrée), rattachée
au PCF pour les problèmes pratiques, mais dans les faits, sous le contrôle
politique direct de l'IC.
Les
non-communistes parlent souvent de "Komintern" pour désigner l'IC.
Les deux termes sont absolument synonymes, mais Komintern est allemand. Si l'IC
peut déléguer à des étrangers, comme Fried,
des
responsabilités auprès du Parti français, des dirigeants français peuvent également
assurer des fonctions qui débordent le cadre national. Ainsi, Duclos, membre du
Bureau Politique et du secrétariat du Parti, député de Montreuil et vice-président
de la Chambre des Députés en 1936 est également membre du comité exécutif
de l'IC et fréquemment mis à contribution pour représenter l'IC auprès des
partis petits frères belges et espagnol.
Dans les années 36-39, le parti compte entre 200 000 et 300 000 membres, et l'essentiel d'entre eux n'ont rien à voir ni avec l'appareil illégal, ni avec l'appareil de l'IC. Mais dès qu'ils prennent quelques responsabilités, ce qui peut arriver très vite, dans ce jeune parti, leur carrière est gérée par la section des cadres, qui relève à la fois du service du personnel et de la police interne. Chaque responsable doit remplir une biographie qui concerne à la fois son propre passé, mais aussi quelques éléments sur son entourage familial. Au fur et à mesure qu'il grimpe les échelons, il pourra être amené à remplir plusieurs fois des biographies de plus en plus précises. Une fois ces biographies regroupées à Moscou, il devient théoriquement possible à un fonctionnaire soviétique de gérer ce personnel révolutionnaire Français.
1936-39
La guerre d'Espagne,
France-Navigation
En juillet 1936, Franco fit contre la République Espagnole sa tentative
de putsch qui se dit en Espagnol "pronunciamiento". La guerre civile
Espagnole commençait, et elle dura jusqu'en février 1939. Les premiers
volontaires du parti communiste furent envoyés début septembre, mais c'est au
cours d'une réunion à Ivry, chez Thorez
, le 18
septembre, où étaient conviés, Fried
, le délégué
de l'IC, Dutilleul le trésorier du Parti, Tréand
, le
responsable de la section des cadres, et Ceretti
, un
Italien à la fois membre du Comité Central et dirigeant de la M.O.I. Les
grandes lignes de l'implication du PCF dans la guerre d'Espagne furent jetées,
et les rôles distribués: Tréand recrutait les militants, Ceretti s'occupait
du ravitaillement en armes, et Dutilleul des collectes. Les choses évolueront
par la suite un peu différemment.
En 1936, le PCF n'était pas au sein de l'Internationale un parti parmi
d'autres. A coté du parti soviétique il restait le seul parti communiste de
quelque importance après l'interdiction des partis dans les pays fascistes,
l'Italie en 1924 et l'Allemagne en 1933. Le Parti français fut à la pointe
pour le soutien à l'Espagne républicaine. Rappelons qu'en 1936, tous les
grands pays, y compris l'URSS, s'étaient officiellement prononcés pour la
non-intervention, laquelle sera vite violée par l'Allemagne et l'Italie. Les Républicains
reçurent l'aide directe de la seule URSS, mais comme celle-ci ne souhaitait pas
intervenir directement pour ne pas contrevenir aux règles de la
non-intervention, et que de toutes façons, il fallait bien faire transiter les
armes soviétiques par le territoire Français, le Parti français, en plus de
l'action de soutien qu'il avait initié dès août 36, joua un rôle majeur
d'intermédiaire entre l'URSS et le gouvernement républicain espagnol.
Comme on sait, le gouvernement de Léon Blum
resta
sur la ligne de la non-intervention et refusa l'aide directe aux républicains.
Dans la pratique, l'attitude de Blum et de ses successeurs ne fut jamais celle
d'une stricte neutralité. En août 36, Blum désignait le douanier Gaston Cusin
comme
le responsable au sein de l'appareil d'état de l'aide clandestine à l'Espagne.
Cusin rencontra Thorez
et
Duclos qui, eux, désignèrent Ceretti
comme
interlocuteur du parti communiste. C'est ainsi que tout fut mis en place pour
que d'énormes quantité d'armes et matériels divers puissent transiter par les
ports et le territoire français. Le PCF dut alors se doter d'une infrastructure
adéquate pour faire face à des problèmes de logistique tout à fait nouveaux.
De son coté, Cusin pouvait s'appuyer sur trois mille douaniers sympathisants
dont une centaine d'hommes sûrs pouvaient faire des contrebandiers d'élite.
Une compagnie maritime, France-Navigation fut créée sous l'autorité de
Ceretti
, en mai
1937, pour le plus grand bonheur du gouvernement espagnol impuissant à
convaincre d'autres compagnies d'avoir à affronter le blocus de ses ports par
la marine franquiste, pour le plus grand bonheur, aussi, de Staline
, qui
voulait bien livrer des armes aux Espagnols, mais sans engager de bâtiments
soviétiques. Le gouvernement espagnol avait mis les trois quarts de ses réserves
d'or à l'abri, en URSS, de sorte que Staline n'avait pas de problèmes pour se
faire payer. On avait bricolé, pour France Navigation, une façade de société
capitaliste honorable, avec un siège dans un immeuble cossu du boulevard
Haussmann, et un homme de paille, un certain Fritsch
, à la
présidence. La société reçut en dot trois navires de la commission espagnole
précédemment en charge de la même mission, et en acheta immédiatement trois
autres. Dés Septembre 37, elle possédait 14 navires. Pour des fins purement
capitalistes, c'est-à-dire pour procurer des revenus au Parti, une filiale fut
fondée en Grande-Bretagne. En 1939, France Navigation est la quatrième
compagnie maritime française.
En complément de France Navigation, l'entreprise de transports routiers
de Pelayo
assure
la traversée du territoire français avec des dizaines de Dodge, Ford, Latil.
Il y a tous ceux, également, qui s'occupent d'approvisionnement de toutes
sortes de denrées. Michel Feintuch, un immigré juif polonais, que l'on connaîtra
mieux sous le pseudonyme de Jean Jérôme,
achemine vers l'Espagne républicaine des armes, mais aussi des machines,
du cuivre, du zinc. Pour mener à bien tous ces traffics, il y aura désormais
place au Parti, pour l'homme d'affaires d'un genre particulier, à coté du
vendeur de l'huma, du tribun syndicaliste et du normalien journaliste.
En janvier 1939, la Catalogne fut envahie par les phalangistes. A cette
époque, l'essentiel du trésor espagnol était déjà à Moscou, mais entre
temps, la République avait tenté de se reconstituer un petit magot. Saisie en
banque de tous les dépôts en pierres précieuses, et l'aristocratie espagnole
en avait beaucoup, fouilles de fond en comble des palais et haciendas de ces mêmes
aristocrates. Avec les derniers dépôts de la banque d'Espagne et des monts de
piété de Catalogne, cela faisait assez pour remplir plusieurs wagons d'un
train fabuleux qui gagna la frontière française de Cerbère, avec d'autres
convois d'armes soviétiques non utilisées. Une partie de ce trésor fut récupérée
par Negrin
et
son gouvernement en exil au Mexique. Une autre resta aux mains du PCF, censé le
gérer pour le plus grand bien de l'aide aux réfugiés et de l'aide au parti frère
espagnol, le PCE, réfugié en France, et à la charge du parti français. Une
histoire déjà compliquée, mais qui deviendra vite inextricable quelques mois
plus tard avec la dissolution du parti par Daladier
. Pour le
PCF, la dernière phase de la guerre d'Espagne fut humanitaire, pour secourir
les centaines de milliers de réfugiés qui croupissaient dans des camps depuis
janvier 1939.
On a souvent dit que la guerre d'Espagne avait été une anticipation du cataclysme qui devait secouer le monde de 1939 à 1945. Complètement mobilisé dans le soutien à l'Espagne, le Parti ne pouvait ignorer les sombres nuages qui obscurcissaient l'horizon. Plus que jamais, il fallait se préparer à la clandestinité. Trois hommes se répartirent la recherche de planques: Certaines étaient de vastes propriétés, fort éloignées de Paris, jusqu'en Belgique ou en Suède; par dérision, les communistes parlaient de leurs châteaux, ce fut l'affaire de Ceretti . On confia à René Mourre le soin de trouver des fermettes dans le bassin Parisien. Les HLM des boulevards de ceinture et les pavillons de banlieue étaient du ressort d'Arthur Dallidet. Il sacrifia avec Mounette bien des dimanches pour sillonner à vélo toute la région parisienne et bien au-delà. C'est ainsi qu'Arthur et Mounette furent les premiers "cyclistes du Hurepoix".